Carnet de route

Bulgaria 2013

Le 16/03/2013 par Maunand Michel

Bulgaria, blagodaria Thierry !

Thierry est passé maître dans l’organisation d’expéditions à skis de rando dans des massifs que la plupart ont du mal à situer sur la mappemonde (Caucase 2006, Kola 2010, Tatras 2011…).

Du 16 au 24 mars 2013, nous étions donc 10 cafistes de notre club, en parfaite parité, dans ces Balkans chargés d’Histoire, base de départ Sofia, la mutante, fière d’être européenne.

Un vent de sud-ouest soutenu a balayé les chaînes de Rila, du Pirin et du Vitocha, ce dernier surplombant la capitale, les 2 autres barrant successivement l’accès à la Grèce toute proche. Seulement 3j de soleil, mais tous les jours à se dépenser entre forêts denses et sommets sous les 3000m. En fait de sommets, nous n’avons pas pu tous les gravir, trop souvent couchés sous les rafales floconneuses.

Notre groupe a toutefois réalisé 8000m de dénivelés sur 8jours, dont un jour à 1600+ en s’arrêtant juste 150m sous le plus haut sommet, la Musala (2925m), et un autre à 1900m+ lors de la traversée du massif de Rila.

Voici la chronologie de cette grande traversée intense et exceptionnelle :

1. Tous couchés tard la veille à danser aux sons d’un (très) vieux groupe folklorique, largement arrosés (nous et eux !) des bons vins locaux (cépages Mavrud), des bières locales et des verres de rakija costauds, perdus dans ce village de Govedartsi presque déserté de sa jeunesse, maisons et rues souvent délabrées,
2. réveil pâteux 6h…, p’ti dej copieux 7h, préparation de piques niques et zou, on y va !
3. notre chauffeur Sacho se fraye au lever de soleil un passage glissant jusqu’à une minuscule station de ski vide, à peine enneigée,
4. notre jeune guide Ivo donne le départ à 8h avec couteaux pour certains,
5. des traces d’ours impressionnantes boostent nos jambes entre hêtres et épicéas,
6. 4h et 1400m plus haut, arrivée sur une belle arrête mixte entre le Malakmetchit et le Goliametchit à 2580m, appelés aussi Monts d’Ours !
7. descente agréable jusqu’au refuge non gardé de Kobilino Bramshte, avec ses restes de rakija que nous refusons de finir : non mais, nous sommes sportifs !
8. repautage pour un autre sommet, le Vodniyashal (Mont d’Eau) à 2640m et 500m+ un peu essoufflant pour deux ou trois en serre file,
9. le balisage est parfait avec une enfilade de poteaux indicateurs orientés remplaçant les cartes bulgares aléatoires
10. encore une longue traversée afin d’éviter les barres rocheuses en contre bas, on a soif !
11. enfin la descente dans une neige croûtée, puis transfo, puis très transfo dans les pins (où je plonge !)
12. long chemin de fond de vallée en neige glacée à l’ombre sur 8km pour rejoindre notre bus, c’est dur dur !
13. il est 17h30, nous sommes fourbus et fiers !
14. quelques kms plus bas, sans se changer, dans cette vallée sauvage éclairée par les sommets couchants, visite du plus beau monastère du pays, celui de Rila, imposante bâtisse de 300 cellules sur près de 1ha et 3 à 4 étages, aux jeux de contrastes chromatiques surprenants, tenu aujourd’hui par seulement 5 moines, déserté des pèlerins et touristes à cette heure tardive,
15. puis 2h de route jusqu’à notre prochain gîte aux pieds des montagnes du Pirin, un petit hôtel posé dans ce village triste de Dobrinishte, mais une hôtesse généreuse, dont le repas tout aussi généreux va nous reconstituer avant la douche chaude bien méritée.

Sans cette intensité physique rare, quelques commentaires sur les autres jours et notre groupe,

rempli d’énergie pour tenter de suivre les jambes d’acier de Géraldine,

riant des bons mots d’Hervé,

godillant et chutant,

suivant l’évolution des petites misères aux pieds de Sylvain et aux doigts de Thierry coincés dans une portière du bus, soignés par Guy notre médecin,

réussissant à réparer les fixations volantes de Nathalie,

Agnès réalisant son reportage sur les vielles Traban dans Sofia,

Yvette jonglant avec ses sacs (à dos !),

Edith traçant toujours impeccablement,

croisant des autres groupes de Français (Bulgarie, quel succès as-tu !),

empilant des milliers de clichés, sauf pour moi, adepte des PDA (photos des autres !),

buvant les soupes à 2 sous (heu à 2 Léva !), avec lentilles, ou tripes, ou haricots blancs, dans des refuges bondés, dehors la tempête sifflant…

se pourléchant des yaourts bulgares aux myrtilles,

essayant de dire oui en hochant la tête de droite à gauche (non = haut en bas, essayez !),

circulant parmi les odeurs oubliées du chauffage au charbon dans des hameaux perdus, les annonces funèbres affichées un peu de partout renforçant notre perception de tristesse,

surpris de la politesse des conducteurs s’arrêtant au premier pied posé sur des chaussées défoncées,

déçus des motoneiges polluantes et interdites dans le parc national des 7 lacs,

caressant le tronc de 7m de circonférence d’un pin de Macédoine aux 1300 ans d’age,  

jouant aux petites combines avec nos housses de skis pour ne pas payer la taxe à Lufthansa,

s’imprégnant des chœurs magnifiques lors des messes orthodoxes,

arborant un petit bracelet traditionnel offert à chacun dès l’arrivée, une torsade de fils blancs et rouges, un porte bonheur rituel jusqu’à l’arrivée des premières cigognes, plus tard…

longeant des vestiges délaissés du communisme complétés anarchiquement par l’urbanisme capitalistique,

plaignant cette population en diminution de 7 millions d’âmes avec ses nouveaux riches et une classe moyenne naissante, cruelle évolution sociale pour les nombreux plus faibles,

les statistiques confirmant un pouvoir d’achat 60% inférieur à notre moyenne européenne,

mais c’est la vie, terminant bruyamment avec forts Nazdravés nos fins de journée dans les bars locaux magnifiquement décorés, soif, que nous fais-tu faire ?

étonnés par cette petite mosquée peinte au centre de Samokov, ville désuète du sud,

agressés par cette nouvelle station de ski ultra moderne de Bansko, jouxtant des anciennes ruelles protégeant leur église orthodoxe au superbe intérieur en bois peints,

engloutissant des repas variés servis dans des belles assiettes en terre cuite,

nous délassant dans des bains chauds naturels, sauf pour moi adepte de la DDH (?!!!)

et terminant notre retour sur Sofia avec une paire de chaussures de ski embarquée par erreur, la propriétaire bulgare devant certainement en louer une autre paire pour terminer son WE de ski !

C’est tout cela notre voyage en Bulgarie, et bien d’autres encore à vous raconter.

Michel