Carnet de route

Ski en Albanie
Sortie : Ski de montagne en Albanie du 07/02/2015
Le 15/02/2015 par Maunand Michel
Cette année, c’est l’Albanie qui nous a accueilli, avec des incursions au Kosovo voisin, en skiant sur les crêtes des frontières avec la Macédoine. Patchwork balkan.
Une semaine de ski parfaite, avec de la très bonne neige pendant six jours, quatre courses découvertes dans deux massifs isolés Albanais (Valbona/Korabi) et deux autour de la station Kosovare de Brezovika.
Notre groupe de huit skieurs fut homogène et soudé. Il le fallait car nous n’avions pas de guide local en Albanie pour explorer les vallées profondes, les forêts d’hêtres et de pins sylvestre, les sommets pelés ou chargés par le vent. Là-bas, les cartes sont anecdotiques et les topos vagues. Au départ des gîtes d’altitude (environ 1200m), les habitants nous indiquaient une direction. On explorait à vue. Chaque jour, c’était souvent plus de 1000m de dénivelé, des fois en repeautant, malgré les chutes de neige du début de semaine, le vent fort, l’absence d’analyse météo et de secours potentiels. Nous avons été prudents, renonçant à des sommets ou cols, appliquant nos connaissances avec rigueur. Les descentes furent fantastiques, accompagnées un jour par les deux jeunes du gîte de Kukaj, montés sans peau de phoque, avec des vieux skis et chaussures de pistes, une ode à la démerde et à la force des bras ! Sans cause à effet, le lendemain, Thierry a du changer une fixation (heureusement dans nos trousses de réparation) après un bel exercice d’équilibriste dans les forêts.
Au Kosovo, pays frère, la petite station fonctionnait cahin-caha, avec un télésiège ouvert, une dameuse et le bruit strident des motoneiges. Une enclave riche dans un pays pauvre. Poudreuse extra en bas, neige dure et soufflée sur les hauteurs, vent de folie. Notre accompagnateur kosovar, Fis, bon skieur rider mais inexpérimenté en ski de rando, connaît bien la station. Au 2° jour, il arrive en retard, le télésiège démarre en retard, un repeautage dans le vent, nous voila parti à la recherche d’une grande descente hors pistes, scrutant les pentes raides, les plaques et les barres, embrassant un point de vue magique jusqu’à la Bulgarie et la Grèce. En choisissant le couloir le plus fiable à priori, c’est notre accompagnateur local qui s’y lance en premier, et qui fait un violent roulé-boulé à grande vitesse. Une bonne entaille à la tête (il avait oublié son casque !), une rapide intervention de notre médecin (merci Guy), pas de 112 et seuls, sa jeunesse et sa forme physique aidant (à Fis !), nous avons pu terminer cette boucle vers la route, direction l’hôpital pour Fis à qui nous disions adieu, et une heure de retour à pieds à la station pour le groupe un peu égaré. Tous, nous étions troublés. Les pizzas nous attendaient à 16h à l’hôtel. Notre chauffeur Albanais, Fati, endossa le rôle d’accompagnateur, dans un bon anglais, et le départ fut donné à 17h pour 5h de route vers le village de Korabi et sa route terminale enneigée, le bus chaîné, la piste étroite, la nuit sans lune nous évitant une vue sur les précipices ! Quelle journée…terminée dans une pièce blanchie à la chaux et son poêle à bois central, un bon repas en commun assis en tailleurs, une nuit serrés sur des couchages en peaux de mouton (+ nos bons duvets, faut pas exagérer !).
Est-ce cela l’aventure à portée de chez nous (4h de vol avion) ?
Nos séjours à l’étranger, c’est plus que du ski, plus que des montagnes nouvelles, c’est un petit groupe qui s’amuse, qui se connaît de mieux en mieux au fil des journées, qui doit faire corps, et qui s’intègre dans l’habitat, les coutumes, les hiérarchies familiales, les rencontres locales, avec un charme fou, qui découvre les soupes aux haricots, le pain fait maison, les plats de viandes énormes, cadeaux de nos hôtes, leurs boissons (chut !), les activités agricoles et pastorales. En une semaine, toutes nos découvertes restent superficielles, sans parler de la barrière de nos langues enjambée chaotiquement par l’anglais approximatif ou la gestuelle.
Que résumer de notre aperçu sur ces deux pays confettis, ex-communistes, tournés maintenant vers l’occident, dont nous percevons les stigmates des dictatures si récentes ?
Ils sont peuplés d’une génération rurale et montagnarde peut-être en péril, et bien sûr tiraillée par l’exode vers les villes ou l’émigration, avec des ambiances contrastées, une jeunesse éduquée et moderne. Les religions sont œcuméniques (80% musulmans, 15% orthodoxes et 5% catholiques) douces et tolérantes, les conducteurs débrouillards et respectueux, les centres villes dynamiques, certains restaurants (trop !) luxueux, plantés nul part, les bâtiments officiels à peine gardés, les faubourgs tristes mais très vivants, les télévisions omniprésentes à la maison et dans les bars enfumés, avec programmes de sports et de chanteuses à moitié nues, même « cinquante nuances de grey » est à l’affiche à Tirana. Le coût de la vie est environ 60% inférieur par rapport à chez nous (sauf carburants et médecine), les coupures d’électricité sont nombreuses, l’Euro est la monnaie de facto au Kosovo et bien acceptée en Albanie. Le Kosovo enclavé est un tout petit pays, reconnu seulement par la moitié du monde.
Assez irréel d’y avoir mis nos chaussures de ski !
Dans ces Balkans, il faut imaginer l’avenir incertain, se rappeler le passé complexe et goûter un présent étonnant.
Allez y à pieds, à ski, à cheval, mais allez y !
Edith, Géraldine, Claudie, Thierry, Guy, Sylvain, Hervé et Michel